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Roma - Messina 2017 Edited byMaria Caccamo CaltabianoCoeditorsBenedetto Carroccio, Daniele Castrizio, Mariangela Puglisi, Grazia Salamone XV INTERNATIONAL NUMISMATIC CONGRESS TAORMINA 2015 PROCEEDINGS I 1 A NTIQUITY , GREEK de Griffon (Pl. I, 16), hydrie (Pl. I, 17), que l’on peut répartir en 44 groupes, en tenant compte de la métrologie ou de l’orientation des motifs 8 . Ces premières émissions adoptent sur leurs revers des reprises, plus ou moins proches, du «carré creux quadripartite à croisillons» utilisé à Phocée. Comme on le voit à Emporion en Ibérie 9 , l’atelier va rapidement dénir son propre revers-type que l’on peut qualier ainsi : «carré creux à coins ronds, à fond plat et à rebords internes parfois biseautés». Cette période, qui compte le plus grand nombre de groupes, est globalement marquée par une qualité d’exécution des gravures qui peut s’avérer excellente, au moins pour les premiers coins, mais qui se détériore assez rapidement. Cette situation semble dénoter la présence au sein de l’atelier, dès le début des frappes, et ce, tout au long de la phase A, de quelques graveurs de haute qualication. Le reste de la production de cette époque étant assurée par des artisans ou des élèves beaucoup moins rompus aux techniques complexes de l’art de la gravure. Cette évolution est bien perceptible sur les groupes à fort volume. Les maîtres graveurs, très certainement venus de Phocée, ne semblent pas avoir été véritablement remplacés car la production que nous connaissons pour la phase suivante va souffrir d’un manque global de qualité.La phase B se distingue principalement par un étalon qui change, des séries qui se limitent en nombre de motifs tout en augmentant de volume. Les modules utilisés se réduisent à une obole et sa moitié (hémiobole) et une faiblesse généralisée du style des gravures est observée. On y détaille 8 groupes différents qui viennent rajouter 6 nouveaux types : protomé de bouc? ( Pl. II, 18), Hippalectryon (Pl. II, 19), Hippalectryon / cavalier (Pl. II, 20), cheval / cavalier (Pl. II, 21), coq? (Pl. II, 22), tête de Gorgone (Pl. II, 23). À noter, pour cette période, l’existence d’une création «pure» et unique en numismatique, l’Hippalectryon: animal hybride proche d’un cheval, avec ou sans cavalier, doté d’une volumineuse queue de coq 10 . Au total, cet ensemble archaïque utilise 23 types variés qui se répartissent en 52 groupes. Donnée importante: sur ce nombre élevé, seulement 4 types sont communs avec ceux de la Marseille grecque et 13 peuvent être qualiés de créations propres à l’atelier de Théliné . 8 Voir, sur ce thème, la classication systématisée de Feugère, Py 2011, pp. 22 -29 et 415-416, ainsi que Maurel 2013. 9 Chevillon, Ripollès 2014. 10 Chevillon 2015, pp. 23-24. C’est dans le cadre de la 2 ème vague de migration liée à l’annexion de Phocée par les Perses en 545 av. J.-C. 1 que fut créé, quelques années plus tard, sur les bords du Rhône et à peu de distance de la mer, sur le possible emplacement de la Rhodanousia antique 2 citée par les textes, un emporion phocéen. Une phase d’extension importante est ainsi constatée sur ce site à partir des années 540/530 3 . Une cité, nommée Théliné 4 (la nourricière), se fonde alors sur les bases d’une colonie grecque traditionnelle. Véritable interface maritime et uviale à vocation portuaire 5 , car bien située sur le principal axe de communication orienté vers l’intérieur de la Gaule et le nord de l’Europe, la ville va connaître un essor rapide. Sa population phocéenne, qui connaît l’usage de la monnaie frappée, va très vite éprouver le besoin d’émettre son propre monnayage. Fortement imprégnées par l’ambiance phocéenne d’srcine, ses émissions se scindent en deux phases bien distinctes 6 . La plus ancienne (phase A), se caractérise par des frappes à types multiples 7 dotées de motifs qui se distinguent nettement de ceux du répertoire iconographique de Massalia et d’Emporion avec un style, au moins pour les premiers coins de chacun des groupes, qui s’avère de bonne qualité. Ces monnaies s’alignent sur l’étalon phocaïco-persique et les modules utilisés, des 1/8 e , 1/14 e , 1/16 e , 1/32 e , 1/64 e de statère, sont très majoritairement de poids légers (ce qui n’est pas le cas, pour cette période, à Emporion et Massalia). On recense actuellement 17 types pour cette phase : tête de déesse à la perruque étagée et à la boucle d’oreille (Pl. I, 1), tête de phoque (Pl. I, 2), phoque nageant (Pl. I, 3) , protomé de bélier (Pl. I, 4), échassier (Pl. I, 5), indéterminé (Pl. I, 6), tête de dauphin (Pl. I, 7), petite tête féminine (Pl. I, 8), protomé d’aigle (Pl. I, 9), oiseau avec dauphin nageant au-dessus (Pl. I, 10), protomé de bouquetin (Pl. I, 11), tête de bélier (Pl. I, 12), tête casquée (Pl. I, 13), tête de Griffon (Pl. I, 14), deux thons nageant en directions opposées (Pl. I, 15), protomé 1 Gras 1995. 2 Tréziny 2002. 3 Arcelin 2008, p.108. 4 C’est le poète latin Festus Aviénus, dans ses Ora Maritima , vv. 689-691, décrivant un périple dans la basse vallée du Rhône qui nous renseigne sur le nom donné à cette ville avec le texte suivant : «là s’élève la cité d’Arles, nommée Théliné aux siècles précédents, lorsque les Grecs l’habitaient». 5 Morel 2002, p. 36. 6 Nous préparons actuellement un ouvrage complet dédié à ce mon-nayage archaïque à partir d’un catalogue regroupant plus de 500 spécimens. 7 Picard 1981, pp. 53-55. J EAN -A LBERT C HEVILLON Le monnayage archaïque de la Théliné grecque (Arles, France) 2 P ROCEEDINGS - XV. I NTERNATIONAL N UMISMATIC C ONGRESS T AORMINA 2015 moins de 5 % de la masse du dépôt, n’avaient aucune raison d’être réutilisées en tant que numéraire sur cette zone et que leur destination nale était certainement de servir à la fabrication de nouveaux objets en argent. D’autant, qu’en dehors de cet ensemble «clos», il est conrmé aujourd’hui qu’il ne se trouve pas de monnaies équivalentes, sous une forme «isolée», en Étrurie (Italie). Bibliographie A RCELIN C. 2008, Arles protohistorique. De l’implantation coloniale grecque à l’agglomération portuaire indigène. C.A.G. 13/5, Arles, Crau, Camargue , 97-114. C HEVILLON J.-A., B ERTAUD O., G UERNIER R. 2008, Nouvelles données relatives au monnayage archaïque massaliète, RN 2008, 164 e volume, SFN, Paris, 209-244. C hevillon J.-A., R ipoll Ė s p.p. 2014, Emporion archaïque : genèse d’un revers-type, Revista Lucentum XXXIII, Université D’Alicante (Espagne), 281-285. 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Avec, pour Théliné , une zone qui va de l’étang de Berre jusqu’aux Alpilles et qui se poursuit en direction du Var et de l’Italie avec une présence attestée en Étrurie (trésor de Volterra) 11 et quelques autres dans le Languedoc occidental / Roussillon et en Ibérie (Emporion et Arse-Saguntum) et, pour Massalia, un secteur qui comprend principalement sa chôra ainsi que l’est et le centre des Bouches-du-Rhône avec quelques débordements côté Var. Reet de l’expansion rapide de la cité grecque de Théliné (Arles) et de sa position initialement indépendante par rapport à Massalia, son abondant et bien typé monnayage archaïque (vers 520 / vers 475 av. J.-C.), devient un révélateur du destin initial de cette fondation et nous apporte un éclairage nouveau sur la mise en place «complexe» de l’ emporia phocéenne au sein de l’Extrême-Occident grec 12 . Il faut désormais rajouter les frappes archaïques de Théliné , la future Arelate au faciès nettement plus «celto-ligure» 13 , à celles des deux autres fondations phocéennes que furent Massalia en Gaule 14 et Emporion en Ibérie 15 . À propos du trésor de Volterra… L’histoire de ce monnayage débute en 1868, avec la découverte en Étrurie, près des remparts de la ville de Volterra d’un «trésor» du même nom. Composé de divers objets, tous en argent, dont 65 petites monnaies, qui, pour les 52 qui nous sont parvenues à ce jour, appartiennent toutes désormais à l’ensemble étudié ici. Concernant ce dépôt, l’analyse des éléments qui le composent nous amène à constater un fait majeur: il contenait des baguettes en argent qui furent détruites rapidement et qui pesaient, d’après Gamurrini 16 , un peu plus d’un kilogramme au total. Si l’on tient compte de cette spécicité, du caractère hétéroclite du contenu et du fait que la statuette qualiée «d’idole en argent» est décrite comme ayant sa base «arrachée», ce qui conrme qu’elle a très certainement dû servir auparavant, on peut considérer que ce «trésor» présente toutes les caractéristiques d’un «dépôt de fonderie». Ce type de dépôt ayant pour but de réunir le maximum de métal précieux, quelle que soit sa forme, dans le but d’anticiper un travail de fondeur. Grâce aux avancées concernant ce monnayage, on peut en conclure que ces monnaies, toutes issues d’un secteur éloigné et dont le poids total proche de 50 g représentait 11 Cristofani Martelli 1977. 12 Rouillard 1995, p. 103 ; Garcia 2004, p. 76. 13 Arcelin 2008, p. 102. 14 Furtwängler 1978 ; Chevillon, Bertaud, Guernier 2008. 15 Ripollès, Chevillon 2013. 16 Gamurrini 1872, pp. 208-209. 3 A NTIQUITY , GREEK P LANCHE I ( PHASE A)P LANCHE II ( PHASE B)